Les derniers ajustements de vêtements faits, les harnais sont bouclés et le groupe forme une file élégante qui avance à coup d’efforts sur le lit de galets de la Owl river. Puis, d’un geste brusque, je stoppe tout le monde. Le crissement des pulkas sur la neige soufflée et durcie laisse place à un silence abyssal. Je m’entends prendre une profonde inspiration. Delphine, qui ferme la marche et guide cette expédition avec moi me rejoint à l’avant.
- Regarde devant, je lui dis.
Regrouper tout le monde derrière, donner les consignes, brèves et claires. Saisir piolets, pelles,
cartouches pour les bear banger. Garder les raquettes aux pieds, la tête froide. Surtout, rester groupés.

Un dos rond, couvert d’une fourrure blanche virant au jaune balance doucement à gauche, à droite. Le museau noir émerge dans un tableau arctique en gris et blanc. Je n’ai pas peur. Mais je ne respire plus. L’ours, majestueux, avance vers nous, à tout juste cent mètres maintenant
- Alors, on fait du bruit?
- Non, on attend.
- …
- On attend.